Moon

Mon réveil sonna et je me réveillai en sursaut. Surprise, je grognai et envoyai la machine infernale valser à travers ma chambre et elle alla s'écraser contre le mur. Je laissai ma tête retomber sur mon oreiller, les yeux toujours clos, reprenant tranquillement ma respiration qui était erratique et irrégulière.
Ce n'était pas la première fois que ce rêve venait hanter mes nuits. Il aurait pu être superbe si je ne me réveillait pas à chaque fois au même moment, que cela en devenait rageant. Chaque nuit, j'espérai et chaque matin quelque chose venait gâcher mon souhait et me laissait dans cet état de surprise et de d'énervement total. Il était un mystère qui s'immisçait dans mon esprit que parfois je me torturai avant de m'endormir, à savoir si oui ou non cette fois je connaitrai le fin mot de l'histoire.
Cinq courtes minutes plus tard, je me décidai à me lever. Repoussant ma couette au bout de mon lit, je m'assis et mes pieds se posèrent au sol. Je m'étirai longuement et me mit sur mes jambes, puis allai directement à ma fenêtre, que j'ouvris en grand. Tout les matins, c'était mon premier réflexe et ce depuis que j'avais eu l'âge d'atteindre l'ouverture.
L'air frais et pur du matin envahit ma chambre et je me sentis mieux. Les rayons matinaux du soleil me chauffait la peau et ravie de ce magnifique temps, je me surpris à envisager de ne pas aller en cours. Pensée que je repoussai ; ma vie n'était pas des plus calmes et il ne servirait à rien d'empirer le tout avec des heures de colle.
Laissant les battants grands ouverts, je me saisis de mon jean noir qui trainait sur ma chaise de bureau et prit dans mon armoire une chemise à manche courte, à carreaux noirs et rouges puis allai dans la salle de bain.
Me débarrassant de mon pyjama, je me glissai dans la cabine de douche et réglai l'eau aussi chaude que ma peau le supportait. Je profitai plusieurs minutes de ce calme et laissai mes membres qui se détendaient un à un puis sorti, en m'enroulant dans une grande serviette éponge, la seule que je possédais.
Je m'essuyai énergiquement avant de m'habiller. Je me regardai ensuite dans la glace. Par chance, mes cheveux roux, qui virait plus vers le rouge ce que m'exemptait du surnom idiot de Poil de carotte, n'étaient pas en désordre. Ils étaient courts, m'arrivaient un peu au dessus des épaules et étaient lisses sans que je ne passe plusieurs heures avec un fer à lisser. Ma frange ne me cachait pas les yeux pour peu que je la coupe régulièrement et elle s'arrêtait juste au dessus des sourcils. Je leur passai un coup de peigne et le tour fut joué. Pour mes yeux, un petit trait de crayon suffit, je n'étais vraiment pas d'humeur à me maquiller pendant des heures. Je mis ensuite mon pendentif en forme de petite clé, présent de ma défunte grand-mère et qui me faisait office de porte-bonheur, bien que je n'y crut pas réellement. J'enfilai ensuite ma montre et glissai une bague en argent, simple à mon pouce ainsi que quelques bracelets noirs serrés à mon autre poignet.
Fin prête, je sortis, prenant soin de laisser la porte ouverte pour aérer la buée que je venais de faire. Tout en descendant les escaliers étroits, j'essayai d'entendre le moindre petit bruit, mais ce fut le silence complet que je trouvais. Il n'y avait donc personne chez moi.
Cela ne me fit ni chaud, ni froid, j'y étais habituée depuis plusieurs années. Précisément depuis mes parents avaient divorcés, quand j'avais treize ans. D'un commun accord, ils avaient décidés que je vivrais avec ma mère mais que mon père pourrait me rendre visite quand il le souhaitait et vice-versa. J'étais libre de mes mouvements, je n'avais pas totalement à choisir.
Les choses n'étaient malheureusement pas si simple. Mes parents ne se supportaient plus et rien que de les savoir dans la même pièce me faisait froid dans le dos, malgré les efforts qu'ils fournissaient quand je me trouvais chez l'un ou chez l'autre. Par bonheur, dès que j'avais obtenue mon permis ainsi que ma première voiture, les craintes que j'avais n'avait plus lieu d'être. Je me rendais par mes propres moyens chez mon père, qui habitait encore en ville et ma mère pouvait vivre sa vie, sans avoir besoin de se soucier de mes visites régulières. Parfois, quand elle était de bonne humeur, elle me disait de passer son bonjour à mon père, pour la forme, histoire que je pense pas qu'ils étaient définitivement en froid. Je transmettais toujours le message, n'entrant cependant pas dans son petit jeu.
La réalité était là, point final, et je ne pouvais rien y faire. Je n'étais même pas sûre de le souhaiter, comme la plupart des enfants de parents divorcés.
J'entrai dans la cuisine, ouvrit les volets et fouillai dans les placards de quoi me faire un petit-déjeuner convenable. Je dénichai le fond d'une boite de céréales et pris la dernier carton de lait disponible. Chanceuse comme je l'étais ce matin, il restait même encore un peu de chocolat en poudre.
Tout en me préparant ce repas, je notai mentalement d'aller ce soir faire des courses, si nous voulions manger à notre faim pour le dîner. Puis je m'installai à la table, où trônait un petit mot que je n'avais pas vu.

Ma chérie,
Je suis sortie ce soir, je ne pense pas rentrer demain matin, avant de filer au boulot. Il faudrait que tu postes les chèques des factures, en allant au lycée, elles sont dans l'entrée s'il te plait.
Je t'aime,
Maman

Je souris. C'était ma mère tout craché. Ce genre de petites notes, j'en avais vu des dizaines et des dizaines en seulement trois années et même si au début, je n'appréciais pas les sorties nocturnes de ma mère, qu'elle décidait toujours après mon couché, je m'y étais faite. Je ne voulais pas inverser les rôles et je la laissais donc vivre sa vie comme elle l'entendait. Jamais je ne lui demandais ce qu'elle faisait de ces soirées et nuits, je m'en doutais suffisamment pour en rajouter une couche. Elle semblait heureuse, c'était ce qui comptait le plus.
J'engloutis mon bol et le déposai dans l'évier, qui était déjà plein. Puis je remontai me brosser les dents, vérifiant l'état de la panière à linge qui elle aussi débordait. Je savais ce que je ferais de ma soirée ainsi.
Fermant ensuite la fenêtre de ma chambre, je pris mon sac de cours, noir avec des tas de pins ainsi que de petits dessins de mes peu nombreux amis puis dévalai les escaliers une nouvelle fois. Prenant soin de bien prendre les enveloppes de ma mère, je saisis ma veste en cuir noir au porte-manteau et l'enfilai, décidant de ne pas la fermer vu la chaleur extérieur. Je sortis de la maison, clefs de ma voiture en main.
Ma petite Fiat 500, présent de mes parents était garée dans la cour, seule portion de jardin que nous possédions. Le quartier modeste où je vivais n'offrait pas d'immense étendue d'herbes et de grande piscine dans chaque propriété, mais des maisons deux chambres avec une salle de bain, une cuisine et un petit salon qui faisait également office de salle à manger. La plupart des habitations étaient construites sur ce même modèle et c'était cela que mes parents avait achetés il y a dix-sept ans maintenant. Mais cela m'allait, je ne me voyais pas autre part.
Je m'installai à la place conducteur et mis le contact. Elle démarra au quart de tour et après une petite manœuvre j'étais sur la route.